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Le Nutri-Score

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Depuis plus de 6 ans, le Nutri-Score estampille nos produits du quotidien. Pour rappel, le Nutri-Score se présente sous la forme d’un code couleur allant du vert foncé (pour les meilleurs produits) au rouge (pour les plus mauvais), complété par des lettres allant de A à E.

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Ce classement permet aux consommateurs d’évaluer rapidement quel aliment est bénéfique ou non pour leur santé d’un point de vue nutritionnel. Enfin, ça c’est dans la théorie. En pratique, le Nutri-Score a bien des défauts. 

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Il ne tient absolument pas compte du degré de transformation des aliments, ni de la présence d’additifs ou de polluants éventuels (pesticides entre autres). Mais ce n’est pas tout, le Nutri-Score ne reflète pas du tout certains procédés douteux auxquels ont recours les industriels pour transformer certains produits alimentaires.

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Je pense en particulier à l’extrusion, le prétraitement par friture ou encore le raffinage des céréales et des féculents, qui transforme des sucres lents en sucres rapides. J’en veux pour preuve certaines céréales du matin notées A ou B, alors qu’elles sont bourrées de sucre et ne présentent plus aucun intérêt nutritionnel du fait de leur procédé de fabrication. Mais comme l’algorithme du Nutri-Score considère qu’elles sont riches en fibres et contiennent peu de graisses saturées, il les classe d’emblée dans la catégorie des « bons aliments ». Et le malus apporté par la grande quantité de sucre n’est pas suffisamment pénalisant pour faire chuter leur score…

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Avec ce système de notation qui met de côté des facteurs importants en matière de nutrition, on se retrouve avec un nombre impressionnant de produits bien notés alors qu’ils ne le méritent pas ! Ainsi, une huile d’olive bio est parfois très mal notée, tandis qu’un produit industriel, bourré de pesticides, bénéficie d’un joli A vert foncé…

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Mais le problème ne s’arrête pas là. Il y a quelques semaines, 300 scientifiques et professionnels de la santé ont réclamé la généralisation du Nutri-Score à tous les pays de l’UE. Aujourd’hui, le code couleurs n’est utilisé que dans sept pays : l’Allemagne, la Belgique, l’Espagne, la France, le Luxembourg, les Pays-Bas et la Suisse.

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Certes le Nutri-Score offre un certain confort au consommateur. Il permet, en un seul coup d’œil, de faire un choix rapide. Mais au vu des lacunes que présente  son algorithme, cette généralisation risque d’être contreproductive.

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C’est à nous tous qu’il revient de prendre conscience de ce que nous ingérons et de ce que nous voulons, ou non, mettre dans notre organisme. Aucun Nutri-Score ne pourra jamais le faire à notre place, alors ne tombez surtout pas dans le piège de la facilité et continuez à vérifier les étiquettes de vos produits. Vérifiez la présence ou non d’additifs, de substances toxiques, de sucres ajoutés ou cachés, la provenance des matières premières, le degré de transformation de certains aliments…

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Histoire vécue : 

L’autre jour, je me suis rendu au supermarché avec mes enfants. Comme vous le savez peut-être, je suis un adepte du régime méditerranéen, connu pour ses vertus santé. Je me dirige donc vers le rayon huile d’olive. Au même moment, mes enfants me demandent avec insistance « est-ce qu’on peut manger une pizza ce soir ? ».

Je leur réponds : « Hors de question ! Pas de cochonnerie transformée dans nos assiettes ». Je voulais leur préparer une bonne salade avec de l’huile d’olive et des bruschettas. Je prends donc mon huile extra-vierge préférée, convaincu que je tenais là le Graal pour la santé de mes enfants. Mais je me rends compte avec horreur que son Nutri-Score indique un médiocre « C ».

Pire encore, mes enfants le remarquent, rigolent et vont chercher une pizza surgelée « végétarienne et au levain » d’une marque bien connue. Et vous ne devinerez jamais : son Nutri-Score  était « A » ! Comment convaincre mes enfants que tout cela ne faisait aucun sens ? Ce soir-là, je leur ai donc concédé une pizza…

Mais, ce même soir, j’ai fait mes recherches sur ce Nutri-Score car je n’étais pas du tout convaincu. Et j’ai découvert que ce système était de la poudre aux yeux. D’où vient ce Nutri-Score  ? Le Nutri-Score a été développé en France en 2017, sous l’égide du chercheur Serge Hercberg de l’Université Sorbonne Paris Nord. Il s’inspire largement du système de couleurs vert-jaune-rouge de la FSA (Food Standard Agency) du Royaume-Uni, développé presque 10 ans plus tôt1.

Son objectif initial était noble : informer les consommateurs sur la qualité nutritionnelle des produits alimentaires pour les aider à faire des choix plus sains2. Cependant, dès le départ, des questions ont émergé sur l’influence des lobbys de l’industrie alimentaire. En effet, ces lobbys ont réussi à faire pression pour que le Nutri-Score soit volontaire, ce qui signifie qu’il n’est pas obligatoire pour les fabricants d’apposer cette étiquette sur leurs produits3. Cette concession aux intérêts économiques a déjà mis en péril la crédibilité du système.

Le Nutri-Score attribue une lettre et une couleur à un produit alimentaire en fonction de sa composition nutritionnelle. Les produits les plus sains sont notés en vert avec la lettre « A », tandis que les moins sains sont notés en rouge avec la lettre « E ». 

Pour calculer le Nutri-Score, plusieurs éléments sont pris en compte :

  • Les nutriments à favoriser (fibres, protéines, fruits, légumes, fruits à coque) sont pris en compte positivement.
  • Les nutriments à limiter (calories, acides gras saturés, sucres ajoutés, sel) sont pris en compte négativement.
  • Des points sont attribués en fonction de la quantité de ces nutriments dans 100 grammes de produit, et le score final est obtenu en soustrayant les points négatifs des points positifs.

Autrement dit, le Nutri-Score  décompose un produit alimentaire en petits blocs, auquel il attribue des + et des –. Une vision binaire de l’alimentation.

Mais il ne prend pas en compte l’origine du produit : naturel ou agro-alimentaire ? Biologique ou transformé ? En outre, il ne prend pas en compte non plus les possibles traces de pesticides, ni les additifs comme les édulcorants, les conservateurs, les colorants

Bref, le Nutri-Score ne juge pas un produit alimentaire dans sa totalité. Et c’est pour cela qu’une pizza surgelée végétarienne peut avoir un meilleur score que de l’huile d’olive. Parce que, si vous faites la liste (abstraite) des ingrédients, la pizza végétarienne au levain a plus de “bonnes choses” que l’huile d’olive : légumes, peu de gras, etc. Mais vous vous rendez bien compte qu’une pizza industrielle sera toujours moins saine que de l’huile d’olive, ne serait-ce que parce qu’elle contient de nombreux conservateurs.

En 2022 et en 2023, le Comité Scientifique International a voulu réformer le Nutri-Score  pour équilibrer ces incohérences. Mais ont-ils changé pour le mieux ?

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Un pas vers la bonne direction ? L’algorithme Nutri-Score a été ajusté par le comité scientifique dans un rapport de 135 pages4.

Les révisions proposées comprennent :
  • — Mettre en œuvre une évaluation rigoureuse des aliments riches en sucre et en sel.
  • — Améliorer la classification des poissons gras qui ne contiennent pas de nutriments ajoutés tels que l’huile ou le sel.
  • — Valoriser les huiles végétales d’une classe sur l’échelle Nutri-Score. Les huiles végétales à faible teneur en acides gras saturés, comme l’huile de colza, de noix, de tournesol oléique et l’huile d’olive, peuvent désormais atteindre une classification B. L’huile de tournesol est reclassée en catégorie C.
  • — Instaurer une distinction plus claire pour les fruits à coque et les graines sans sel ni sucres ajoutés, majoritairement classés en A ou B. Les versions salées et/ou sucrées sont généralement classées en catégorie C voire D.
  • — Améliorer la différenciation entre les produits à grains entiers naturellement riches en fibres et les aliments transformés/raffinés à teneur relativement faible en fibres (pain complet vs pain blanc).

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Je suis convaincu qu’il existe de meilleures alternatives pour guider les consommateurs vers des choix alimentaires plus sains.

— L’éducation nutritionnelle, par exemple, permettrait aux individus de comprendre les bienfaits des aliments frais et non transformés par rapport aux produits transformés.
 — Les applications de suivi de la nutrition qui permettent aux consommateurs de scanner les codes-barres et d’obtenir des informations détaillées sur les produits, sont également une option.
 — Encourager la consommation de produits locaux et biologiques pourrait être une approche plus holistique pour améliorer la santé publique.

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En fin de compte, le Nutri-Score, malgré ses bonnes intentions, ne résout pas les problèmes fondamentaux liés à notre système alimentaire, comme l’accès inégal aux aliments sains et la dépendance à l’industrie agro-alimentaire. De plus … 

  • son algorithme ne prendrait en compte qu’une partie des aliments, ainsi il ignorerait les pesticides, les édulcorants, les colorants, les conservateurs et certains allergènes
  • il ne se soucierait pas de la provenance biologique
  • il nous ferait encore consommer trop de sucres (L’OMS a fixé une limite à l’apport quotidien de sucre. Cette limite est de 50 grammes pour un adulte. Chez le Nutri-Score ? Cette limite est fixée à 90 grammes, que vous soyez un adulte ou un enfant !
  • Ignorant le niveau de transformation du produit !

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Sources :

[1] Sacks, G., Rayner, M., & Swinburn, B. (2009). Impact of front-of-pack ‘traffic-light’ nutrition labelling on consumer food purchases in the UK. Health Promotion International, 24(4), 344-352

[2] https://www.lemonde.fr/sciences/article/2018/02/20/le-logo-nutritionnel-arrive-dans-les-rayons_5259488_1650684.html

[3] Gamberini, Angelo (4 June 2020). « Nutri-Score: how to ruin the Farm To Fork concept – Carni Sostenibili ». 

[4] https://www.bmel.de/SharedDocs/Downloads/EN/_Food-and-Nutrition/nutri-score-update-algorithm.pdf?__blob=publicationFile&v=2

[5] https://www.efsa.europa.eu/en/news/added-and-free-sugars-should-be-low-possible

[6] https://www.who.int/news/item/27-09-2021-state-of-play-of-who-guidance-on-front-of-the-pack-labellingles conservateurs et les alergènes

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