Print Friendly, PDF & Email

La névrose ou conduite d’échec

.

« En ce monde, il y a deux tragédies : la première est de ne pas obtenir ce que l’on veut et la seconde est de l’obtenir. La dernière est de beaucoup la pire, c’est une vraie tragédie ! » Oscar Wilde

.

Aussi pauvre que soit la littérature psychiatrique à son sujet, elle correspond à des situations réelles où s’exprime la complicité souvent objective entre la répétition des échecs et la personnalité du patient.

Le concept de névrose d’échec a comme particularité d’associer un terme médical, la névrose, avec un mot évoquant le domaine social et sociétal et que le Larousse définit comme le « résultat négatif d’une tentative, d’une entreprise, manque de réussite ; défaite, insuccès, revers ».

Depuis quand la médecine, et en particulier la psychiatrie, a-t-elle décidé de considérer la réussite professionnelle ou personnelle, ou son absence, dans le registre de la norme ou de la pathologie ? Quels sont les arguments scientifiques pour considérer les « los- ers » comme des personnes malades, et dans ce cas faudrait-il aussi soigner les « winners »? Que signifie le mot succès ? Il peut être socialement apparent et pourtant ne pas correspondre au ressenti de la personne. Est-ce un concept dont l’intérêt est purement historique, mais aussi, notamment, à l’origine chez Freud, de notions psychopathologiques essentielles, comme la compulsion de répétition et la pulsion de mort ?

.
Dans les années 1960, la psychologie expérimentale s’est penchée sur les facteurs psychologiques qui conditionnent la réussite et l’échec. Deux psychologues américains, Rosenthal et Jacobson, ont décrit « l’effet Pygmalion » : une prophétie autoréalisatrice qui provoque une amélioration des performances d’un sujet, en fonction du degré de croyance en sa réussite venant d’une autorité ou de son environnement. Le simple fait de croire en la réussite de quelqu’un améliore ainsi ses probabilités de succès. L’effet Pygmalion a été principalement étudié dans le cadre des effets positifs. L’effet inverse est appelé « effet Golem » : il se traduit par une performance moindre et des objectifs plus faibles sous l’effet d’un potentiel jugé limité par une autorité (parent, professeur…).

.

individu lorsque celui-ci parvient à un succès. Elle s’opposerait donc à l’épanouissement de la personnalité, et frapperait de stérilité tous les domaines de l’activité dès que celle-ci dépasserait un certain degré, et ce d’une façon éminemment variable. Les uns sont atteints sur le plan affectif, d’autres sur le plan matériel ou social. Certains sont freinés sexuellement, pour d’autres, c’est l’activité intellectuelle qui paraît inhibée, leur activité affective étant plus libre. La personne réagit comme si elle avait besoin d’être punie de son succès. Il existe naturellement une relation entre ce besoin d’échec et le sentiment inconscient de culpabilité.

.

En 1933, Freud attire l’attention sur ce type particulier de sujets qui «… échouent devant le succès ». Pour lui, leur cas met en évidence un paradoxe : alors que la frustration externe n’est pas pathogène, c’est la possibilité offerte par la réalité de satisfaire le désir qui est intolérable et déclenche la « frustration interne » : le sujet se refuse ainsi à lui-même la satisfaction. Ce mécanisme constitue pour Freud non une névrose, ni même un syn- drome, mais un mode de déclenchement de la névrose et le premier symptôme de la maladie. Freud rapporte certains types d’échec névrotique à la compulsion de répétition, notamment ce qu’il appelle des compulsions de destin. Il rapproche cette répétition douloureuse des expériences infantiles de situations existentielles survenant en l’absence de névrose caractérisée et décrit ainsi la répétition des échecs propres à certains destins.

.

En 1936, René Laforgue décrit la névrose d’échec chez des sujets dont les conflits œdipiens non résolus entraînent la recherche autopunitive et masochiste des échecs. Le sujet organise inconsciemment sa vie de façon à ne pas parvenir à ses fins : il s’agit d’une « intolérance totale et systématique au succès », dans le cas où des projets seraient normalement réalisables. Pour Laforgue, c’est une forme particulière de masochisme où l’évitement d’une réussite constitue une source immédiate de soulagement. Ces conduites d’échec seraient liées, selon lui, à une culpabilité inconsciente, en relation avec un désir œdipien de meurtre du père que l’échec dans la réalité de toutes les entreprises peut seul apaiser.

.

En 1968, Pierre Mâle poursuit le développement du concept de névrose d’échec, en particulier chez les ado- lescents. Il considère cette pathologie comme un syndrome regroupant des manifestations multiples, témoignages des tensions conflictuelles qui reproduisent d’une manière régulière cet échec venant de l’intérieur. Il insiste sur deux aspects de la névrose d’échec, qui se développe lors de l’adolescence : l’infantilisme affectif et des actes divers qui viennent s’opposer au succès, comme des oublis et des phénomènes d’amnésie. L’auteur insiste sur le caractère répétitif de ces conduites qui ne découragent pas seulement l’intéressé, mais aussi son entourage, en créant un cercle vicieux.

.

Le terme de névrose se justifie ici par le fait que ce type de conduites est lié à toute une gamme de conflits psychiques, eux-mêmes inconscients : sentiment de culpabilité pathologique, refus de s’affirmer par le succès en rivalité avec un parent, identification à un parent malheureux, crainte de la dimension agressive que risque de comporter le succès… On peut parler également d’une névrose d’autopunition ou d’un caractère masochiste, ou encore de névrose de destinée. D’une façon générale, l’échec est le prix payé par toute névrose, dans la mesure où le symptôme implique une limitation des possibilités du sujet, un blocage partiel de son énergie. La névrose d’échec n’a pas de rapport avec l’effet de l’incapacité ou de la malchance : c’est une recherche intentionnelle inconsciente et répétitive de l’échec aussi bien dans la vie professionnelle que sociale.

.

Ce trouble est généralement associé à d’autres traits de personnalité, comme, par exemple, la dépendance ou l’évitement. Il se complique parfois de troubles dépressifs de l’humeur, d’idées, voire de comportements suicidaires.

Une basse estime de soi peut être à l’origine de conduites d’échec. Ce dernier terme, l’échec, a un caractère rassurant ; il évite de remettre en cause ses propres compétences. La personne se crée un auto-handicap : elle choisit systématiquement des objectifs trop difficiles ou impossibles à atteindre. Cela se traduit par une accumulation d’échecs sociaux, dans le domaine professionnel notam- ment, affectifs comme les déboires senti- mentaux, voire de troubles de la sexualité ou encore un isolement affectif croissant. 

.

Quant au pronostic des troubles de la personnalité à conduite d’échec, il a été démontré que, contrairement à certains troubles de personnalité, leur décroissance n’est pas observée avec le temps. C’est d’ailleurs aussi le cas de nombre de personnalités décrites par l’homéopathie :

.

Les calcium  (ralentis et peureux)

  • Baryta carbonica : patient assez lent dans la compréhension, souvent frileux, inhibé et angoissé, timide en société, enfant jouant à des jeux d’âge inférieur. 
  • Calcarea carbonica : complexe d’infériorité, peureux de type « évitant » et lent dans tous les domaines avec une tendance à l’obésité. 
  • Calcarea phosphorica, patient fatigué, maigre, avec une compréhension lente, une baisse de mémoire, des maux de tête lors de l’effort intellectuel, une peur de l’obscurité.
  • Kalium bromatum : préconisé en cas de fatigue physique et psychique suite aux examens, surmenage intellectuel, cauchemars et terreurs noctures, baisse de mémoire, acné, besoin impérieux de bouger les mains, somnambulisme, troubles de la parole (emploi d’un mot pour un autre …). 
  • Agaricus (pb) : patient qui présente des difficultés de compréhension avec une torpeur intellectuelle, souvent associée à une mémoire assez faible. Déjà plus jeune, il présentait un retard à l’apprentissage de la marche. Souvent nerveux et irritable, il peut avoir des tics de la face, surtout lorsqu’il se concentre. Les insomnies et les colères ont lieu facilement. 
  • Medorrhinum : indiqué si grognon, ayant peur de l’obscurité, avec un manque de mémoire et d’attention, un comportement précipité, toujours agité des jambes et des pieds, ne finissant pas de qu’il a commencé. 
  • Rana bufo (cu) : handicapé qui présente un manque de contrôle de ses impressions et de ses réactions, une tendance à l’infantilisme, rire stupide, pleurs et colères faciles avec tendance à mordre, se fâchant s’il n’est pas compris, ayant une mémoire faible. 

.

Les angoissés :

  • Staphysagria (na) : patient écrasé par une autorité trop forte qui le paralyse et le frustre en l’empêchant de s’exprimer, se réfugiant dans la nourriture sucrée, n’arrivant pas à extérioriser ses problèmes, avec refoulement, rancune, susceptibilité et une tendance aux caries. Amélioration en mangeant et en dormant. 
  • Ignatia amara (na) : émotifs à humeur variable, ruminant leurs soucis. Les problèmes sont aggravés par les contrariétés, amélioras par les distractions, et s’accompagnent de soupirs fréquents, d’une sensation de boule à la gorge, d’insomnies émotives. 
  • Gelsemium (mn) : indiqué en cas de problèmes de concentration et de résultats scolaires avec une tendance au trac et à la panique provoquant une incapacité à réfléchir sereinement. Tremblements et diarrhée émotive sont souvent associés. 
  • Lycopodium (al) : patient fier qui ne supporte pas l’échec, qui a tendance à la rumination et se montre rancunier.
  • Pensez aussi à : Natrum mur. … bloqué dans ses souvenirs.

.

Les impulsifs (mal dans leur peau) :

  • Anacardium orientalis (am) : indiqué chez les étudiants sursaturés (saturation des capacités cérébrales) qui ont la sensation de ne plus pouvoir mémoriser, manifestant de l’indécision, une fatigue intellectuelle, des difficultés de compréhension aggravées par tout effort intellectuel, des troubles de l’humeur avec colères et accès de méchanceté. Amélioration en mangeant. 
  • Mercurius solubilis : à utiliser si difficultés de compréhension et de concentration, avec une lenteur des réponses, une relative indifférence affective, un caractère peu sociable avec tendance aux colères. 

.

Les phosphores (hypersensibles insécurisés) :

  • Kalium phosphoricum : fatigabilité à l’effort intellectuel pouvant être prise pour un manque de volonté, une tendance à l’anxiété et à l’indécision, une baisse de mémoire, un caractère grognon, parlant la nuit, manifestant des bâillement fréquents. Amélioration par un long sommeil. 
  • Silicea : indiqué si le patient est intelligent, au regard vif mais nerveux, sursautant au moindre bruit, très sensible au froid, timide dans l’action, manquant d’assurance et de confiance en soi, avec un besoin constant d’être encouragé, des difficultés d’attention, des ongles plus ou moins cassants avec des taches blanches, une fatigue cérébrale aggravée pendant l’effort intellectuel. 
  • Phosphoricum acidum : convient aux étudiants épuisés, fatigués nerveusement, avec une forte diminution de la mémoire, un découragement, des maux de tête, une fuite de tout effort cérébral ou de réflexion aggravée par le manque de sommeil et les difficultés à se réveille le matin. 
  • Pulsatilla (si) : masochiste et dépendante…
  • Zincum metallicum : à utiliser en cas de fatigue physique et intellectuelle chez un sujet comprenant difficilement, répétant la question avant d’y répondre, avec des mouvements permanents des pieds et des jambes, un sommeil agité, ne supportant pas le vin. 

.

Le remède, donné en haute dilution (> 12 CH) accompagné d’une psychothérapie adaptée, aura la plupart du temps un effet remarquable.

.

D’après un article de Marina LITINETSKAIA et Julien Daniel GUELFI dans Santé mentale 2018

Inscrivez vous à notre newsletter !

Vous appréciez les articles de notre site ?

Vous vous intéressez à la santé naturelle et à la médecine fonctionnelle ?

Laissez nous votre email pour recevoir toutes les semaines des articles, des infos et des conseils